Mission 66 : novembre-décembre 2013

Par Béatrice Chapuis, anesthésiste – chef de mission

Petite parenthèse dans notre quotidien, Grande et riche expérience dans notre vie !

DSCF0015Comment ne pas rester encore à Moundou auprès des patients, de leur famille et de l’équipe du centre MNDP qui nous ont fait confiance et doivent maintenant reprendre leur destin en mains ?

Après l’annulation, pour raisons de politique locale, de la mission de janvier, les cas prioritaires sont devenus des urgences médicales et sociales à prendre en charge ; DSCF0136la rénovation du bloc de l’hôpital de Moundou, financée par l’AFD et suivie par BASE (ONG tchadienne) a imposé la venue en éclaireur de deux courageuses infirmières dont l’intervention « musclée » a permis de travailler dans un bloc fonctionnel et propre dès le lendemain de notre arrivée.

DSCF0178 Le bilan humain présente les contraintes lourdes de son efficacité.DSCF0568

92 patients opérés laissent une énorme charge de travail à l’équipe du centre :

– 9 cas de polios (pas d’éradication mais nette diminution grâce à la politique vaccinale)

– 9 pieds bots (formation de prévention néonatale effectuée, à réactiver)

– 17 cas de rachitisme dont 6 cas opérés (les autres ont bénéficié de la mise sous vitamine D avec réévaluation à 1 an)

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– 8 séquelles d’injection (reposant le problème de la formation du personnel local)

– 15 cas de chirurgie plastique (fentes labiales type bec de lièvre, nombreuses séquelles de brûlure)DSCF0270

– 21 cas de traumatologie (accidents de motos, chute de camions..) souvent pris en charge par les « tradipraticiens » ; 2 cas pris en urgence à leur arrivée à l’hôpital éviteront sans doute des handicaps secondaires lourds.

– 13 cas d’infections osseuses, résultant souvent de mauvaises pratiques locales.

– une dizaine d’autres interventions orthopédiques.

Léquipe restée en post-mission relève 4 cas à problème (infectieux essentiellement).

La remise en question de notre action, en fonction des résultats et du suivi des cas lourds laissés au centre, est gage de qualité ;

DSCF0330c’est une préoccupation de chaque maillon de la chaîne mais elle ne peut nier le bénéfice inespéré obtenu pour la très grande majorité des patients.

Les contacts noués avec le directeur de l’hôpital, Mr Ousmane, sont également un fort élément d’espoir quant à la pérennité de ce type d’action avec appui sur les éléments motivés repérés localement. Il en est de même pour la relève du personnel du centre MNDP dont certains vont partir et seront remplacés par d’autres en formation actuellement. D’autres acteurs effectuent un travail remarquable dans la région et on s’attache à tisser les liens utiles pour le relais des actions menées.DSCF1701

Les incertitudes géopolitiques locales ne facilitent pas le développement de conditions favorables dans le domaine de la santé, les besoins sont immenses et il est pour nous impossible d’oublier l’action de MNDP qui continue son travail de fourmis remarquable, malgré les secousses politiques régionales.DSCF0861

Que l’espoir demeure !

Réhabilitation du bloc opératoire de l’hôpital de Moundou

 

Juillet 2013 – L’Hôpital de Moundou vit au rythme des chantiers, après la construction d’une nouvelle maternité, inaugurée en avril dernier et opérationnelle depuis juillet, la réhabilitation du bloc opératoire a démarré à la fin de juillet.

Au fil des années, les équipes chirurgicales d’Handicap Santé qui interviennent à Moundou ont vécu la dégradation progressive du bloc opératoire.

L’hôpital, construit dans les années 70 répondait aux règles de construction de l’époque mais par manque d’entretien systématique et régulier les dégradations sont apparues, que ce soit pour les bâtiments, le circuit électricité, et le réseau l’eau. Le bloc opératoire n’a pas échappé à cette lente dégradation et pour garantir des conditions d’hygiène et de travail suffisantes, il devenait urgent de s’atteler à la réhabilitation du bloc opératoire.

Les premières réflexions au sein d’Handicap Santé et des professionnels de Maison Notre Dame de Paix ont démarré en 2005. Des premiers plans ont été établis, des rencontres avec les autorités sanitaires de l’hôpital, de la région et au ministère de la santé se sont succédées au rythme des missions. Mais au-delà des idées et de la bonne volonté, il fallait trouver des moyens financiers pour la réhabilitation. Handicap Santé n’a pas pour vocation de financer des infrastructures publiques tchadiennes, tout au plus pouvions-nous être moteur et faciliter les prises de décisions.

Comme l’Etat Tchadien ne prenait pas la décision de financer cette reconstruction, une réflexion a été menée au sein de Handicap Santé sur la possibilité de construire un bloc opératoire au centre des handicapés Maison notre Dame de Paix. Cette idée a été abandonnée devant les très nombreuses difficultés rencontrées et identifiées.

En 2010, la France au travers de l’Agence Française de Développement décide de financer un vaste programme orienté sur la santé maternelle et infantile pour un montant de 10 M€ sur 3 ans. La construction de la maternité de l’hôpital faisait partie de ce programme.

Au cours de son déroulement, et sur nos recommandations, les autorités tchadiennes décidèrent d’y inclure la réhabilitation du bloc. En 2012, de nouveaux plans sont alors établis en concertation avec l’association tchadienne BASE – Bureau d’Appui Santé et Environnement – maitre d’ouvrage délégué d’une partie du programme, l’architecte conseil de l’AFD et les professionnels de santé de notre association. Le projet est chiffré, le budget adopté au printemps 2013 et la construction démarre en juillet. Pas de temps perdu.

Du matériel chirurgical, tables d’opération, scialytiques, brancards, boites d’autoclave donnés par les hôpitaux de Saint Quentin et de Blois sont partis début juillet par bateau en direction de Moundou via Yaounde et N’Djamena.

La reconstruction devrait prendre 3 mois si la saison des pluies ne vient pas perturber le chantier. La prochaine mission prévue fin novembre devrait donc se dérouler dans de nouveaux locaux.

Nous espérons que ces nouveaux locaux qui vont grandement améliorer les conditions de travail des opérateurs motiveront des chirurgiens tchadiens à s’installer car à quoi serviraient-ils s’il n’y a pas de praticiens permanents ?

Handicap Santé intervient 3 à 4 fois par an pendant des périodes de 15 jours et occupe 2 à 3 blocs. Entre 200 et 300 patients sont opérés par an, mais nous ne pouvons pas opérer tous ceux qui auraient besoin de l’être. Handicap santé peut accompagner des professionnels qui s’installeraient mais nous ne pouvons pas remplacer l’Etat tchadien qui doit remplir sa propre mission.